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L’école Duncan, gage d’un savoir-danser

L’école Duncan, gage d’un savoir-danser

Résumé

Isadora Duncan, danseuse du début du XXe siècle, est animée par un projet d’école pour modéliser son idée de l’art chorégraphique. Fruit d’un engagement familial porté par l’Idéal humaniste, l’établissement-internat des sœurs Duncan rend compte d’une forme scolaire édifiée sur une base esthétique héritée des Lumières. Gage d’un savoir-danser, l’école inscrit la filiation intellectuelle et politique attachée à la notion de Bildung dont la transmission des valeurs, portées par le champ esthétique et celui de la subjectivité, met en perspective un cadre de pensée paradoxale à la formation du sujet critique. Le modèle éducatif des sœurs Duncan, en posant ainsi les jalons pédagogiques d’une démarche expériencielle, dévoile la façon dont se construit l’expérience esthétique de laquelle se dégage une valeur singulière, qui, de nos jours, offre une résistance à la postmodernité laminante et commerciale.

 

L’appel de l’Europe, pour Isadora Duncan et sa famille installée à San Francisco depuis l’émigration de ses grands-parents maternels irlandais en Amérique en 18191, répond à l’aspiration de la danseuse de trouver « une sympathie intelligente, un appui à ses idées »2 qui lui font défaut au début de sa carrière à New-York.
Débarquée à Londres en 1899, la famille s’organise pour faire entrer la nouvelle danse d’Isadora dans la société des élites intellectuelles et artistiques. Grâce à l’appui de Charles Edward Hallé, co-fondateur de la New Gallery avec le peintre Edward Burne-Jones, Isadora et sa famille est introduite dans le salon parisien de Marguerite de Saint Marceaux, puis présentée au sculpteur Auguste Rodin lors de l’Exposition universelle de 1900. C’est dans ces conditions qu’elle fait la connaissance de Sada Yacco, actrice et danseuse japonaise, et de Loïe Fuller, muse de l’Art nouveau et des symbolistes. Invitée par cette dernière à l’accompagner en tournée en Allemagne, Isadora trouve précisément à Berlin le sens artistique rêvé de sa danse puis le soutien financier et le lieu qui va abriter l’école tant désirée.
C’est donc en 1904, dans le riche quartier Grünewald de Berlin, qu’une immense villa avec grand jardin est vendue à Isadora Duncan pour être transformée en établissement scolaire et pensionnat. Une vingtaine de jeunes enfants de quatre à six ans, recrutée pour recevoir une formation à l’art de la danse, se trouve être plongée dans la filiation humaniste des Duncan où la quête constante de l’Idéal, par la recherche de la conciliation entre les exigences de la raison et celles des sens3, répond à la problématique de l’harmonie et de l’équilibre.
Dans le contexte politique de l’époque, où le pôle de l’hygiène est investi depuis 1876 avec l’apparition d’un premier congrès à Dresde dans le cadre de l’organisation des expositions internationales sur l’hygiène, l’école se doit de faire respecter des procédures pédagogiques qui entrent dans un processus d’efficience hygiéniste que soulève le rapport au corps sous l’angle de sa corporéité et de son substrat vital.
Par ailleurs, significative également d’un climat politique et social en crise, l’entrée dans cette temporalité de la modernité est investie par le courant de la Lebensreform qui embrase l’Allemagne. Les pratiques de santé, liées aux conditions environnementales de la vie, explorent ainsi une dimension écologique et politique du sujet pour lequel la revitalisation de son organisme devient l’objectif prioritaire du modèle de cette réforme, au regard de la synthèse qu’il doit permettre entre nature et culture4. Sacralisée par une pensée idéaliste dans chacun des domaines de la vie, la recherche de cette synthèse, en creux de la corporéité, offre à l’école Duncan l’opportunité de réunir de nouvelles modalités pédagogiques qui se trouvent être sous influence du modèle de la Grèce idéale de Winckelmann dont les valeurs, dans le prolongement de la Lebensreform, doivent participer en profondeur à l’hellénisation de la culture germanique5.
La démarche expériencielle dans laquelle se projette l’école Duncan à l’aune de la nouvelle définition des valeurs que propose le champ de la modernité, entre ainsi en syntonie avec la résurgence des deux dimensions historiques et philosophiques diffuses en Allemagne, avec, d’une part, le courant romantique qui revisite les lieux grecs et s’approprie l’histoire de l’art de Winckelmann, à la lumière de son autre vision de la Nature qui est influencée par Rousseau ; la lecture de Winckelmann par Isadora Duncan qui appuie sa pensée sur des éléments légitimés de la Grèce antique. C’est donc au travers de ces éléments que les sœurs Duncan, en duo, s’appuient pour construire un modèle d’école d’excellence, avec pour la danseuse, la reconstruction d’un bric-à-brac intellectuel qui fonde sa sacralité, et par là-même son être au monde dont l’essence est l’aspiration à la beauté ; pour la pédagogue, la transmission du Melos6 du mouvement corporel par l’instruction de savoirs au fondement de la danse d’Isadora Duncan.
Par conséquent, la formation scolaire et humaniste du sujet soumis à la primauté de la valeur de la singularité et aux prises avec un cadre de pensée paradoxale qui fonde l’être au monde de la danseuse et formatrice Isadora Duncan, s’appuie sur les notions d’harmonie et de sublime, dépliées par deux systèmes contradictoires de pensée hérités des Lumières7. Pour autant, la formation humaniste et artistique déployée à l’école Duncan et abordée sous l’angle de l’intentionnalité esthétique du sujet, en ce qu’elle s’appuie sur un Autre qui fonde la nécessité de trouver une solution à « l’énigme portée par une altérité à présentifier »8, semble, au regard de la représentation postmoderne de l’école, se disloquer. Est-il alors illusoire de penser que ce qui faisait autorité dans la construction de notre modalité d’être au monde est amené à n’être plus que la trace d’un vestige du passé ?

L’école Duncan, à l’épreuve de sa forme scolaire

Lors de l’inauguration de l’école berlinoise en 1904, Isadora Duncan, au cours de son allocution, formule en ces termes le premier objectif de l’établissement scolaire de formation à l’art de la danse :

« Retrouver à nouveau le beau mouvement rythmique du corps humain, le mouvement idéal qui doit être en harmonie avec la forme corporelle la plus élevée, pour appeler à nouveau à la vie, d’éveiller à nouveau un art qui a dormi pendant deux mille ans, c’est le premier but de l’école »9.

Significatif de son expérience singulière de l’être au monde10, l’extrait de ce discours nous renseigne sur la façon dont Isadora a construit sa représentation de la danse. Bousculant les valeurs du ballet classique légitimées pour ses critères d’excellence et de virtuosité, la proposition de la danseuse entre alors dans les débats qui cherchent à redéfinir le Beau et le bon goût11. Son style, par la forme privilégiée de la courbe et de la fluidité, est celui qui permet d’envisager autrement le rapport au corps. C’est aussi celui qui porte la représentation classique d’une corporéité construite à travers le prisme de l’Idéal humaniste de l’excellence transmis dans la cellule familiale. A la frontière des temporalités de l’âge classique et de la modernité, sa nouvelle danse s’appuie à la fois sur des valeurs qui fondent le canon de la beauté et sur celles qui lui font découvrir la singularité comme condition de l’expression de soi.
Par conséquent, l’éloge qu’Isadora Duncan fait de sa sensibilité au travers d’un style qui valorise la courbe dont elle récuse la technique, est l’élément moteur et constitutif d’une valeur sur laquelle s’appuie le mouvement symboliste des Arts pour entrer dans une esthétique de l’incarnation12 et imposer la signature de son nouveau style chorégraphique. Sa modalité spécifique d’être au monde, soulignée par la dimension active de sa formation13 qui se manifeste en tous lieux, laisse entrevoir la façon dont elle donne vie aux valeurs philosophiques constitutives de l’Ideal.
Sa sœur Elizabeth, également danseuse, s’est cependant tournée vers l’enseignement. Pédagogue et gestionnaire de l’établissement-internat, elle éduque et instruit les jeunes enfants dans la visée de Fröbel. En raison de leur jeune âge, aucune méthode appropriée n’existe officiellement14 au sein de l’école. Seul le premier document faisant office de programme éducatif s’attarde à souligner la renommée des intervenants et du lieu de leur formation avant de mentionner, à titre indicatif l’emploi du temps hebdomadaire15.
L’école Duncan, à ses débuts, fait donc intervenir un professeur qui assure l’enseignement scolaire général, un professeur de dessin et un médecin chargé de surveiller l’état de santé des enfants. Les autres intervenants, constitués du personnel de maison, du professeur de musique et des membres de la famille Duncan, sont en revanche à demeure16.
L’accueil des très jeunes enfants, définitivement séparés de leurs parents, est assuré par la mère et les sœurs Duncan elles-mêmes dans des lieux aménagés avec goût pour qu’un climat familier, indispensable à la sécurité affective et morale des enfants soit instauré en vue de leur prodiguer une éducation complète. Le temps et les soins apportés aux très jeunes pensionnaires de l’établissement Duncan, favorisent alors une relation proximale avec Elizabeth et avec leur environnement ; « quant aux apparitions d’Isadora, attendues parce qu’elle représente la grande idole de toutes choses »17, celles-ci ont pour effet de susciter chez eux le désir d’entrer dans l’apprentissage d’une expérience singulière de la danse.
Ainsi, l’école des sœurs Duncan, qui n’est pas un endroit comme les autres, fait entendre parler d’elle en ces termes :

« C’est cela que les gens avaient tant de mal à comprendre – et qui ne le pouvaient pas – que dans cette école, il s’agissait de donner, non pas une simple éducation corporelle mais une éducation à la vie, pour former l’humain. Depuis le début j’en avais conscience et toi aussi, tu l’as exprimé avec ces mots en 1948 : « Je t’enseigne une leçon de la vie. » »18.

En faisant de cet établissement un lieu de la transmission du savoir, au même titre d’ailleurs que ce que proposait l’enseignement privé en Europe pour les élèves qui étaient hébergés chez leur maître afin de faciliter leur instruction dans un climat plus familier19, les sœurs Duncan sont enclines à proposer une éducation complète qui se décline en trois objectifs :

• Celui d’élever les enfants, propre à l’éducation familiale20 qu’une des élèves traduit de cette façon : « Vivre ensemble avec [Elizabeth] c’était comme vivre en famille »21.
• Celui d’enseigner, pour répondre à l’instance institutionnelle vouée à l’éducation scolaire qui doit être assurée par des professionnels et des professeurs certifiés dans un espace institutionnel dédié à cette fonction. Les exigences attendues par le conseil scolaire, qui ne peuvent être considérées à la légère, conditionnent par ailleurs la participation à d’autres activités22.
• Celui de former, comme point central de l’éducation à l’art de la danse pour préparer les enfants à occuper une fonction pour le groupe ou pour la société23. Anna, élève issu du premier recrutement, en fait ainsi état après avoir vécu à Berlin et à Darmstadt :

« J’en suis arrivée à l’idée, cher père, que mon point de vue est de continuer à travailler chez Isadora ou bien, disons, de lui rester fidèle, comme Isadora se l’est imaginée et comme elle l’a fait aussi tout au long de sa vie. C’est-à-dire que je n’oublie pas d’où je viens et chéris d’avoir vécu à Darmstadt, que cela m’a aidé à construire mon avenir. Si le destin me permet de travailler et de réussir, alors je dois choisir Isadora comme maître, c’est ce à quoi j’ai réfléchi depuis longtemps et c’est la conclusion à laquelle je suis arrivée »24.

Assuré que les élèves recrutées seraient éduquées conformément au contrat établi avec les parents ou les tuteurs jusqu’à l’âge de dix-sept ans après une période d’essai de trois mois25, le comité directeur de l’école se porte garant des principes éducatifs exposés par les sœurs Duncan pour que la forme institutionnelle de l’établissement obtienne son aval auprès de l’autorité gouvernementale.
Le développement de la forme scolaire de l’école, en répondant à la politique éducative du Reich, montre qu’il mène à ce qui pourrait être assimilé à l’acte manqué d’un projet d’école remarquable. Dans le contexte effervescent des réformes pédagogiques, tout d’abord, puis dans celui de l’économie hygiéniste ensuite, le programme éducatif, dans son évolution, rend compte du renversement des objectifs fixés par les Duncan, attachés à la liberté de l’expression menant à la valorisation de la singularité artistique. Il montre également les changements de fonction des dirigeants dont celle d’Elizabeth, réduite dans son action au sein de l’école, pose alors la question de sa légitimité dans la filiation Duncan.
De plus, la portée du programme éducatif, dans sa forme institutionnelle, n’apparaît qu’en 1911, année de l’inauguration de la construction du nouvel établissement par le Grand-Duc de Hessen à Darmstadt et du Grand Prix obtenu à l’exposition internationale de l’Hygiène à Dresde26. Sous le nom de « Document promotionnel – École d’Elizabeth Duncan Marienhöhe bei Darmstadt, Institut d’éducation corporelle (ou physique) et scientifique, Attribution au Grand Prix de l’exposition internationale de l’Hygiène à Dresde en 1911 »27, ce programme éducatif, analysé à la lumière des archives retraçant l’histoire de l’école, montre que les premiers objectifs fixés par la famille Duncan constituent le socle de la transmission.
Déposés et publiés par les éditions Diederichs sous la forme d’une brochure, les objectifs de l’école, alors au nom d’Elizabeth Duncan28, sont exprimés sous forme de principes qui découlent d’un but général, celui d’accéder à une forme d’harmonie. Constitutifs du projet de former un corps en bonne santé et un esprit qui doit permettre aux élèves d’atteindre un idéal personnel aussi bien qu’un idéal social général grâce à leurs dispositions individuelles, leur compréhension, leur vigueur et leur caractère29, les principes généraux confirment la détermination des sœurs Duncan à vouloir développer, au prix de l’effort, la singularité de leurs élèves. Ils soulèvent également la question de la finalité expérientielle de l’idéal qui consiste peut-être moins à définir le ressenti qu’à inscrire une modalité d’une connaissance implicite de soi pour accéder à cet état et être enclin à le transmettre.
Dans ce programme, les éléments de formation pratique et théorique sont traités sur un même plan30. L’éducation corporelle, suivant les principes d’Elizabeth31, inclue la formation purement gymnique ou le traitement d’une gymnastique thérapeutique par un professeur de gymnastique suédoise32. Imposée par la politique scolaire en vigueur, la gymnastique suédoise l’est au même titre 33 que l’éducation scientifique, les cours pratiques, les langues étrangères, la musique et le discours, le contrôle médical, l’alimentation, les soins du corps, la gymnastique thérapeutique, les soins dentaires, les vêtements, l’emploi du temps.
Les précisions ainsi apportées sur les matières enseignées correspondent donc au programme scolaire validé par l’État. Les autres cours, de dessin, de modélisation, de couture, de jardinage, de ménage et d’hygiène personnelle, enseignés par des professeurs spécialisés34, reflètent également la valeur éducative portée par la pensée pédagogique, dans le contexte de la réforme, et celle qui noue Elizabeth à la pensée de Fröbel. La référence à ses exercices est d’ailleurs mentionnée dans un autre programme édité spécifiquement pour l’école de Darmstadt35.
La publication de ces deux documents, à des fins différentes, montre néanmoins que la dimension attachée au corps, compte tenu du climat hygiéniste de l’époque, demeure centrale dans l’argumentaire. La portée institutionnelle du document promotionnel, quant à elle, rend compte de l’évolution de la structure scolaire et de formation à l’art de la danse implantée à Berlin depuis 1904. A cette époque, le contexte de la Lebensreform, en cherchant à privilégier l’approche écologique de l’homme en son milieu, s’appuyait d’abord sur la nécessité d’un retour à la nature36. Or, l’appel, par la suite, au développement de techniques hygiéniques de plein air qui, par leur usage courant, rejoignait par là-même le courant de naturopathie éthique, avait favorisé l’ancrage d’une empreinte sensible corporelle au moyen de matériels qui influençaient les comportements individuels37.
Cette perspective d’un nouveau rapport au corps, présente alors dès ses débuts dans la formation à l’éducation à l’art Duncanien, est néanmoins happée par les rouages de la politique du Reich. Même si la spécificité des modalités pédagogiques des sœurs Duncan veut être préservée par Elizabeth, l’opérationnalité de la transmission à l’œuvre dans la filiation du savoir-danser Duncanien pose la question de son ancrage.

Le modèle éducatif de l’école Duncan, vestige du passé ?

Les approches pédagogiques des sœurs Duncan, par leur spécificité formative pour l’une et éducative pour l’autre, recouvrent « la notion plus large d’éducation qui se rapporte à la structure fondamentale de l’humanisme comme processus éducatif »38. L’humanisme, dans ce qu’il contient de vivant, atteste effectivement d’une complexité que l’homme doit apprendre à appréhender à travers deux sources complémentaires, celles de la sensibilité au monde et de la raison qui en font la force vitale de l’humanisme39. Dans ces conditions, l’Education ainsi envisagée, imprègne les modalités d’existence de l’homme qui le rendent à la fois opérant et sensible dans son milieu en quête d’équilibre. Cette recherche, construite autour des grands récits fondateurs de l’humanité40, le confronte à la question du sens de sa place dans l’univers et de son aspiration à la vérité.
Pour les sœurs Duncan, cette perspective de l’Education, qui, au début du nouveau siècle, est empreinte du rayonnement culturel et intellectuel de l’Allemagne auquel les intellectuels français, depuis Montaigne et Montesquieu ont participé41, leur permet de mettre en place un dispositif pédagogique inspiré de la Païdeia.
Influencée par la conception esthétique de Winckelmann, qui rend compte d’un remaniement conceptuel de l’idée platonicienne du Beau tout en soulignant les topiques classiques qui la fondent, à savoir l’unité, l’harmonie et la simplicité42, la valeur du Beau, pour les sœurs Duncan, prend du sens et se construit à travers la complexité des échanges philosophiques et des débats liés à l’établissement d’une science du Beau qui tient compte des orientations données au goût et aux sens pour la France et à la contemplation philosophique pour l’Allemagne.
Ainsi, au croisement de l’histoire des idées et de celle des pratiques corporelles, le fonctionnement de l’école repose sur une articulation de modalités pédagogiques qui donnent sens au système de valeurs porté par l’idéal de la Bildung43 et le mouvement dansé d’Isadora Duncan.
La valeur du beau, continuellement évoquée et investie dans l’œuvre des Duncan comme référence majeure à l’Antique, est aussi celle d’une éducation sur laquelle la famille s’est appuyée pour structurer et façonner leur mode d’être au monde. Cette double perspective de l’héritage Duncan, constitutif à la fois de la conception éducative transmise par la famille elle-même et de celle d’un système de valeurs classiques relayé par la philosophie et l’histoire de l’art, est ce qui permet aux sœurs Duncan de poursuivre le but familial en continuant à faire vivre l’idéal au travers de leur école.
La transmission de cet idéal, portée par le désir de perfection, devient opérante pour les Duncan lorsque la famille fait de la valeur du beau un vecteur dynamique à l’incarnation d’un modèle éducatif aspiré par l’utopie idéelle du Bien. La problématique de la perfection par ailleurs attachée à la vertu que soulève déjà la noblesse grecque pour la formation de l’homme-citoyen à la connaissance du Bien, doit répondre en effet à une exigence de la culture et de la pensée mobilisée par la volonté et la logique du désir d’être meilleur. La transmission de pratiques ou de théories au sein de cette lignée dite supérieure qu’il convient de maintenir, repose donc sur un enjeu majeur de légitimation d’une filiation de rang et de la transmission d’un savoir-faire. Conçue alors sur un mode initiatique, la Paideia devient un modèle éducatif qui implique de trouver, par la transmission des savoirs, la voie philosophique donnant accès à l’art de vivre, à cette attitude concrète qui engage toute l’existence dans un style de vie déterminé44.
Enjeu de citoyenneté, la Paideia, en ce qu’elle constitue un privilège de classe, est bien une voie sélective qui n’attire à elle que l’être dans la volonté de la noblesse, celle qui cherche en effet la grandeur de l’âme par le perfectionnement de la vertu que l’élite investit et appréhende en acte, c’est-à-dire en conciliant théorie et pratique expérientielle45(Nihoul, 2016-2017).
Aussi, le projet ambitieux de la vie que porte le courant de la Paideia s’inscrit dans une tradition qui, par la voie de la pratique philosophique et de l’art de communiquer, marque le maître du sceau de la connaissance contagieuse et l’élève, ou le disciple, de cette même connaissance contaminante.
Dans l’école des sœurs Duncan, le don, comme règle première de l’éducation, conditionne l’interaction entre le maître et l’élève-disciple qui se déploie et se renforce dans le temps jusqu’à créer un lien social impliquant nécessairement un amour et une confiance réciproque. En outre, la perspective de la formation humaniste envisagée par Isadora et Elizabeth à travers le modèle de la Paideia met en évidence le principe qui régit l’acte du transmettre, celui qui obéit au désir de devenir meilleur.
Le désir, posé par ailleurs comme condition première d’accès à la Connaissance, c’est-à-dire à l’idée du Beau en ce qu’elle permet l’expérience du sentiment de l’amour du beau et du bon, est un principe sur lequel les sœurs Duncan s’appuient pour construire leur savoir-danser46.
L’éducation à l’art de la danse, alors dispensée dans une ambiance qui informe de la façon dont l’instruction et la formation à l’excellence sont appréhendées, est fondée sur une culture du corps vouée à « la danse sacrée pour exprimer les aspirations de l’esprit vers une sphère plus haute que la sphère terrestre »47. Les modalités pédagogiques mises en œuvre semblent donc contenir les enfants dans un projet qui construise le sens de leur façon de se représenter et d’être au monde. Alors que l’action éducative d’Isadora passe par sa présence formatrice, c’est-à-dire par la démonstration de son expérience singulière de sa danse qui éveille les élèves au désir de la suivre, celle d’Elizabeth passe par le dévouement48 qui l’engage totalement auprès d’eux.
L’attitude et la posture des sœurs Duncan, au cœur de leurs modalités pédagogiques innovantes, constituent cette compétence du savoir-être qui donne envie d’apprendre et d’enrichir des savoirs qui seront, à leur tour, passés pour être accueillis et assimilés en d’autres corps.
C’est donc par ce processus que maître et élève-disciple engagent une relation garantissant de bonnes conditions de circulation au bien, objet de l’échange, pour que le don demeure présent et vivant par l’évocation de sens qu’il confère à autrui49. Ainsi, la maturité intellectuelle de l’élève-disciple, gage de l’autonomie de sa pensée et de sa pratique, lui permet d’occuper la place qui lui revient et de répondre au don qui lui est fait. C’est en cela que la filiation intellectuelle peut être maintenue et reconnue en tant que système qui assure la continuité de la passe. Par conséquent, l’enjeu sur lequel repose la réussite du projet d’école des sœurs Duncan ne réside pas tant sur les contenus à enseigner mais sur les modalités de sa transmission qui incluent à la fois les conditions assurant la circulation du bien et ses caractéristiques censées apporter du sens à sa perpétuation.
Les modalités pédagogiques que requièrent alors les différentes formes de l’instruction, de l’éducation et de la formation pour la question du savoir-danser d’Isadora Duncan, exigent, pour l’ensemble des acteurs présents dans le réseau de l’école, de rendre cohérent les éléments du programme scolaire entre eux par une approche de même nature. L’approche pédagogique de la douceur50 dont usent en effet les sœurs Duncan, s’explique par la façon dont elles ont construit un rapport spécifique au corps. Entendu que la corporéité répond à la proposition d’une esthétique de l’incarnation51, la démarche de la famille Duncan et des sœurs en particulier, s’inscrit dans une vision réenchantée du monde qui le célèbre et le magnifie. Cette modalité d’être au monde, « cosmique »52, se construit sur le questionnement et l’avancée des recherches que la mise en jeu des rouages perceptifs et sensoriels du corps provoque, à la fois pour l’agglomérat de chairs et le canal de l’âme qu’il représente dans sa façon d’éprouver les choses du visible et de l’invisible. Appelée à l’élévation, l’approche Duncanienne du corps apparent, dans sa verticalité redressée53, met en évidence le signe de son alliance entre le modèle classique et la sensibilité moderne qui passe par la maîtrise et l’expression d’un mouvement singulier, en quête de son équilibre.
C’est pourquoi, la formation à l’école Duncan telle qu’elle est envisagée, ne peut être dénuée de son cadre humaniste ou de celui de la pratique, puisque l’idéal du Beau, ramené dans ses dimensions symbolique et sacrée, et vécues par corps, assure la continuité d’une vie féconde pour ceux ou celles qui inscrivent leur histoire par rapport à ce tiers54.
Aussi, la discipline et l’exercice qu’implique la praxis orientée sur son propre matériau esthétique, lieu même de la fondation de son immanence55, participent à l’émergence de l’intentionnalité esthétique de la danseuse dont la mise en branle du mouvement intimement ancré dans son “centre” 56 est porteuse de la création de son œuvre. Appelée à présenter au monde le caractère authentique, vrai de son Être qui traverse sa danse, Isadora Duncan fait de cette exploration sensorielle la condition de “l’éprouvement” de ce qui fait divin en elle et lui permet d’établir une relation avec le suprasensible, cette manifestation d’un indicible d’où elle tire l’inédit de l’expression donnée à son mouvement dansé. Cette quête de sa vérité, dont elle en fait un enseignement, constitue une possibilité, pour chacun, de s’ouvrir à l’Autre, ce tiers qui, pour la famille Duncan, est l’Idéal par lequel chaque membre devient auteur, ou encore créateur de vie à travers son projet.

Conclusion

Le modèle de l’école Duncan, en ce qu’il s’inscrit dans l’histoire d’une filiation, est le fruit d’une œuvre élaborée dans la famille biologique des Duncan incluant une parenté intellectuelle.
La science du Beau, centrale dans l’œuvre Duncanienne, s’appuie sur une démarche expériencielle qui éprouve cette notion esthétique débattue continuellement dans le rapport dialectique du général et du particulier qu’elle soulève depuis l’idée platonicienne.
Aussi, en s’emparant de l’histoire des idées et de l’histoire du mouvement, la danseuse Isadora Duncan empreint son style de cet apport qui est au fondement de son savoir-danser. Compte-tenu de la perspective philanthropique et philosophique que donnent à voir les modalités éducatives des sœurs Duncan rendues opérantes dans leur école, la formation à l’art de la danse est significative d’un mode d’être au monde qui se construit arque-bouté à l’idéal humaniste de l’excellence. Dans sa représentation symbolique de la verticalité, l’apprenant au savoir-danser comprend ainsi la nécessité de se modifier lui-même pour s’élever au Bien et accéder à la Connaissance, cette vérité qui se manifeste dans la profondeur du soi et fait émerger, par la praxis et le temps d’un instant, le sens de l’altérité réconciliée. C’est pourquoi, la force de la proposition pédagogique des sœurs Duncan, bien que, ancrée dans le contexte social et politique de leur temps, repose sur leur façon de faire coexister un système de valeurs classiques avec une sensibilité moderne structurée autour de la singularité. Entendu ainsi que la formation au savoir-danser s’inspire du modèle de la Paideia, la logique du désir d’être meilleur et celle de l’économie du don conditionnent le processus d’éveil et d’initiation dans lequel les élèves-disciples s’engagent activement.
De fait, l’activité signifiante du corps en tant qu’expérience sensorielle et perceptive du monde dans lequel l’élève-disciple évolue, place toujours le corps dans un rapport de tensions entre le dedans et le dehors, entre la nature intérieure et la nature extérieure, entre l’être et l’apparence de façon à pouvoir, par l’intercession de l’Autre, appréhender le point d’un équilibre ou d’une unité retrouvée.
Par conséquent, le sens que prend la dimension du vivant, par la mise en mouvement du principe immanent-transcendant augmentée par une praxis spécifique, se joue dans la profondeur de l’Être qui, par sa façon de se relier au monde suprasensible, peut s’appuyer sur la manifestation d’une perception ineffable et pourtant significative de la réconciliation posée par l’énigme de l’origine.

Référence

1 Archive Bundesarchiv Berlin-Lichterfelde R56/V 1174.
2 I. Duncan, [1927], Ma vie, Paris, Gallimard, 2009, p. 53.
3 M. Cauvin, Le renouveau pédagogique : en Allemagne de 1890 à 1933, Paris, Armand Colin, Collection U², 1970.
4 M. Pulliero, « La maison d’éditions Diederichs et la revue Die Tat au cœur d’un projet de Lebensreform comme réforme religieuse, culturelle et  sociale », Lebensreform. Die soziale Dynamik der politischen Ohnmacht in M. Cluet, C. Repussard (dir.), Francke Verlag, 2013, p. 85-116.
5 M. Cluet, « La revue Deutsch-Hellas (1907-1908) », Lebensreform. Die soziale Dynamik der politischen Ohnmacht, in M. Cluet, C. Repussard (dir.), Francke Verlag, 2013.
6 Archive du centre des archives de Berlin, Bundesarchiv R56/V 1174.
7 G. Boudinet, Arts, culture, valeurs éducatives. L’harmonie et le sublime, la monade et la raison : variations philosophiques et musicales des Lumières à la postmodernité, Paris, L’Harmattan, coll. « Sciences de l’Education musicale », 2008.
8 G. Boudinet, Art, Education, Postmodernité. Les valeurs éducatives de l’art à l’époque actuelle, Paris, L’Harmattan, coll. « Sciences de l’Education musicale », 2006, p. 244.
9 Archive du centre de la danse de Cologne, Nr. 69, Livret Verein zur Unterschützung und Erhaltung der Tanzschule von Isadora Duncan E.V. « Die schönen rhythmischen Bewegungen des menschlichen Körpers wieder zu finden, die ideale Bewegung, die in Harmonie mit der höchsten körperlichen Form sein soll, wieder ins Leben zu rufen, eine Kunst wieder zu erwecken, die zweitausend Jahre geschlafen hat, das ist der ernste Zweck dieser Schule ».
10 M. Corvez, « L’Être et l’étant dans la philosophie de Martin Heidegger », Revue Philosophique de Louvain, n°78, 1965.
11 S. Jacq-Mioche, « La virtuosité dans le ballet français romantique : des faits à une morale sociale du corps », Romantisme, vol. 128, n° 2, 2005.
12 J.-B. Roumanes, « Le paradigme esthétique », Horizons philosophiques, 1993.
13 F.-G. Nihoul, De la Philosophie à la Paideia- Pour une éducation vers l’Excellence, Université Catholique de Louvain, 2016-2017.
14 L. Chalmel, « Schärer Michèle. Friedrich Fröbel et l’éducation préscolaire en Suisse romande : 1860-1925 », Revue française de pédagogie, n° 167, 2009, p. 3.
15 Archive du centre de la danse de Cologne, Nr. 69, Programme éducatif de Berlin, 1904 « École à Grunewald ».
16 Archive de l’école d’Elizabeth Duncan, 50 Jahre Elizabeth Duncan-Schule 1904-1954, Herausgegeben von der Elizabeth Duncan Gesellschaft E. V. München.
17 F.-M. Peter, Isadora und Elizabeth Duncan in Deutschland, [traduit par Namèche I., Isadora et Elizabeth Duncan en Allemagne, déposé aux PUHR, 2020], Wienand, 2000, p. 99.
18 F.-M. Peter, Isadora und Elizabeth Duncan in Deutschland…, p. 155.
19 F., Waquet, Les enfants de Socrate, Filiation intellectuelle et transmission du savoir XVIIe – XXIe siècle, Paris, Albin Michel, Bibliothèque Histoire, 2008, p. 221.
20 F.-G. Nihoul, De la Philosophie à la Paideia- Pour une éducation vers l’Excellence…, p. 19.
21 F.-M. Peter, Isadora und Elizabeth Duncan in Deutschland…, p. 94.
22 F.-M. Peter, Isadora und Elizabeth Duncan in Deutschland…, p. 92-98.
23 F.-G. Nihoul, De la Philosophie à la Paideia- Pour une éducation vers l’Excellence…, p. 19.
24 F.-M. Peter, Isadora und Elizabeth Duncan in Deutschland…, p. 120.
25 F.-M. Peter, Isadora und Elizabeth Duncan in Deutschland…, p. 91.
26 Archive du Musée de l’Hygiène à Dresde.
27 Archive du centre de la danse de Cologne, Nr. 69, « Document promotionnel – Elizabeth Duncan-Schule Marienhöhe bei Darmstadt, Institut für körperliche und wissenschaftliche Erziehung, Ausgezeichnet mit dem grossen Preis der internationalen Hygiene-Ausstellung Dresden 1911 ».
28 Le conflit moral qui oppose Isadora au comité féminin de soutien financier de l’école de Berlin montre toute la difficulté à faire coexister le sens des valeurs fondatrices d’un ordre social avec celui que la temporalité de la modernité redéfinit. La morale, pour les sœurs Duncan, placée aux confins de l’amour libre et de l’amour conventionnel, apparaît comme subordonnée à l’esthétisme ; le point de vue, cependant, que défend Isadora, ne fait que resurgir, pour certaines épouses, le questionnement implicite sur l’élaboration du système hiérarchique des rôles attribués aux sexes, fondé essentiellement sur la manière d’user de titres honorifiques induisant une discrimination des statuts à l’intérieur de la famille. Pour ces raisons, Isadora doit quitter la direction de l’école. Voir M. Green, Les sœurs von Richthofen, Deux ancêtres du féminisme dans l’Allemagne de Bismarck face à Otto Gross, Max Weber et D.H. Lawrence, Seuil, 1979, p. 38-45.
29 Archive du centre de la danse de Cologne, Nr. 69, « Document promotionnel…, « […] sie sind imstande] einem persönlichen wie einem allgemein-gesellschaftlichen Ideal, nach ihrer individuellen Veranlagung, verständig, kräftig und charaktervoll zuzustreben ».
30 Archive du centre de la danse de Cologne, Nr. 69, « Document promotionnel…, « Körperliche und geistige Ausbildung werden auf gleiche Stufe gestellt ».
31 Il est question d’implicite car les principes se voient, quand on regarde les productions des élèves qui, en vivant autrefois à l’école (Duncan), les ont incorporés pour les exprimer. C’est ce sens que nous accordons à la traduction de « Die Körperliche Ausbildung erfolgt nach den Grundsätzen Elizabeth Duncans, wie diese sich in den Leistungen der von ihr bisher erzogenen, im Institut lebenden Schülerinnen zum Ausdruck bringen », Archive du centre de la danse de Cologne, Nr. 69, « Document promotionnel…, ».
32 Archive du centre de la danse de Cologne, Nr. 69, « Document promotionnel…, « Die rein gymnastische Ausbildung oder notwendige heilgymnastische Behandlung ist einem Lehrer aus dem Königl. schwedischen Gymnastikinstitut übertragen ».
33 Archive du centre de la danse de Cologne, Nr. 69, « Document promotionnel…, « Wissenschaftliche Erziehung, Praktischer Unterricht, Fremde Sprachen, Musik u. Sprechen, Schulärztliche Krontrolle, Ernährung, Körperpflege, Heilgymnastik, Zahnpflege, Kleidung, Tageseinteilung ».
34 Archive du centre de la danse de Cologne, Nr. 69, « Document promotionnel…, « Zeichnen, Modellieren, Nadelarbeit, Garten- und Hausarbeit und Körperpflege wird der Unterricht von Fachlehrern erteilt ».
35 Archive (en langue française) du centre de la danse de Cologne, KOE 13 « Règlement de l’école d’Elizabeth Duncan à Darmstadt ».
36 « Schlagworte wie « Rückkehr zur Natur » und « natürliche Lebensweisen » hätten damals als Orientierungsmarken gegolten, sagt Krabbe », R. Foitzik Kirchgraber, Lebensreform und Künstlergruppierungen um 1900, Zürich, 2003, p. 18.
37 M. Cluet, « Lebensreformer et Verts en lutte pour un monde meilleur. Divergences et similitudes dans les moyens et dans les fins à un siècle d’écart », Convergences, L’écologie dans le clivage gauche droite – Ökologie im linken und im rechten Spektrum, in A. Lensing, B. Metzger, O. Hanse (dir.), Bern, éditions Peter Lang, vol. 88, 2017, p. 51.
38 D. Moreau, « Que signifie la référence à l’humanisme dans la pensée éducative contemporaine ? », Itinerarios de Filosofia da Educaçâo, 2010, p. 4.
39 D. Moreau, « Que signifie la référence à l’humanisme… , p. 3.
40 G. Boudinet, Art, Education, …
41 A. Haesler, « Victor Cousin en Allemagne », Lectures, Les notes critiques, 2011.
42 C. Streicher, L’appropriation de l’art grec dans les écrits de J.-J. Winckelmann, Thèse de doctorat en histoire de l’art, UQÀM, avril 2010, p. 57.
Dans la visée de Herbart, le concept de Bildung suppose, pour le sujet, un état d’enfance disposé à recevoir l’esprit, (voir G. Boudinet, Un art de l’enfance, Lyotard et l’éducation, éditions Hermann, coll. Education et philosophie, 2019, p. 53) par une éducation qui agit comme un catalyseur pour favoriser son introspection et lui permettre de sonder ses ressources propres.
43 P. Hadot, [1993], Exercices spirituels et philosophie antique, Paris, Albin Michel, 2002, p. 23.
44 F.-G. Nihoul, De la Philosophie à la Paideia- Pour une éducation vers l’Excellence, Université Catholique de Louvain, 2016-2017.
45 I. Namèche, Le savoir-danser d’Isadora Duncan. Origine et transmission d’une œuvre esthétique, Education. Normandie Université, 2019.
46 I. Duncan, La danse de l’avenir, Bruxelles, Editions complexe, Collection Territoires de la danse, 2003, p. 73.
47 Décrite comme une jardinière « qui ne pensait qu’à donner à ses plantes les meilleures conditions, la meilleure lumière, la meilleure chaleur et la meilleure humidité, et de les protéger des dérangements » (voir F.-M. Peter, Isadora und Elizabeth ….., p. 66), Elizabeth Duncan, dans son rôle éducatif et pédagogique, représente le pilier central de la structure Duncan selon le professeur de dessin de l’école, Konrad Müller-Fürer. Il fallait en effet avoir eu « la chance de regarder vivre Elisabeth Duncan au côté des enfants pendant des années et de les regarder travailler » (voir F.-M. Peter, Isadora und Elizabeth ….., p. 66) pour comprendre la portée de son action.
48 M-L. Martinez, M. Larrue, « La séquence”donner, recevoir, rendre” et ses ratés dans la transmission intergénérationnelle… », Biennale internationale de l’éducation, de la formation et des pratiques professionnelles, 2012.
49 L’exigence de l’engagement, dans l’apprentissage, suppose de faire des efforts pour sortir le meilleur de soi et d’emprunter cette voie qui pousse à l’autodépassement par l’exercice d’une force conditionnant l’action des apprenants pour les contraindre à mieux agir. Le point pédagogique de la douleur, implicitement imbriqué au rapport à la violence qu’il s’agit de convertir pour faire émerger le désir de perfection, (voir F.-G. Nihoul, De la Philosophie ….) est mobilisé au travers de l’opérationnalité des modalités pédagogiques sur les contraintes qui conditionnent le passage de la douleur à la joie pour laisser l’empreinte d’une issue heureuse. L’approche pédagogique de la douceur, pour transformer ce rapport à la violence, s’inscrit dans un modèle structurant les logiques de domination et d’économie du don au sein duquel coexistent la dimension affective et la fermeté qui font autorité.
50 J.-B. Roumanes, « Le paradigme esthétique »…
51 P. Hadot, Exercices spirituels…, p. 27.
52 J.-L. Schlegel, Le corps redressé de Georges Vigarello, Felin, 2018.
53 C. Tarot, Le symbolique et le sacré, Théories de la religion, Paris, Éditions La Découverte/Mauss, 2008.
54 G. Boudinet, Art, Education, Postmodernité…
55 Terme emprunté à Isadora Duncan, voir I. Duncan, Ma vie… p. 93) et à Mallarmé, voir (L. Lehnen, Mallarmé et Stefan George, Politiques de la poésie à l’époque du symbolisme, Presses de l’Université Paris-Sorbonne, 2010, p. 148).

Bibliographie

Ouvrages

  • Boudinet, G., Art, Education, Postmodernité. Les valeurs éducatives de l’art à l’époque actuelle, Paris, L’Harmattan, coll. « Sciences de l’Education musicale », 2006.
  • Boudinet G., Arts, culture, valeurs éducatives. L’harmonie et le sublime, la monade et la raison : variations philosophiques et musicales des Lumières à la postmodernité, Paris, L’Harmattan, coll. « Sciences de l’Education musicale », 2008.
  • Boudinet G., Un art de l’enfance, Lyotard et l’éducation, coll. Education et philosophie, éditions Hermann, 2019.
  • Cauvin M., Le renouveau pédagogique : en Allemagne de 1890 à 1933, Paris, Armand Colin, Collection U², 1970.
  • Duncan I., [1927], Ma vie, Gallimard, 1932 pour la traduction française, 2009.
  • Duncan I., La danse de l’avenir, Collection Territoires de la danse, Editions complexe, 2003.
  • Green M., Les sœurs von Richthofen, Deux ancêtres du féminisme dans l’Allemagne de Bismarck face à Otto Gross, Max Weber et D.H. Lawrence, Seuil, 1979.
  • Hadot P., [1993], Exercices spirituels et philosophie antique, Albin Michel, 2002.
  • Lehnen L., Mallarmé et Stefan George, Politiques de la poésie à l’époque du symbolisme, Presses de l’Université Paris-Sorbonne, 2010.
  • Peter F.-M., Isadora und Elizabeth Duncan in Deutschland, [traduit par Namèche I., Isadora et Elizabeth Duncan en Allemagne, déposé aux PUHR], Wienand, 2000.
  • Schlegel J.-L., Le corps redressé de Georges Vigarello, Felin, 2018.
  • Tarot C., Le symbolique et le sacré, Théories de la religion, Paris, Éditions La Découverte/Mauss, 2008.
  • Waquet F., Les enfants de Socrate, Filiation intellectuelle et transmission du savoir XVIIe – XXIe siècle, Bibliothèque Histoire, Albin Michel, 2008.

Revues

  • Chalmel L., « Schärer Michèle. Friedrich Fröbel et l’éducation préscolaire en Suisse romande : 1860-1925 », in Revue française de pédagogie, n° 167, 2009.
  • Cluet M., « La revue Deutsch-Hellas (1907-1908) », in Marc Cluet, Catherine Repussard, Lebensreform. Die soziale Dynamik der politischen Ohnmacht, Francke Verlag, 2013.
  • Cluet M., « Lebensreformer et Verts en lutte pour un monde meilleur. Divergences et similitudes dans les moyens et dans les fins à un siècle d’écart », in Annette Lensing, Birgit Metzger, Olivier Hanse (Dir.), « L’écologie dans le clivage gauche droite – Ökologie im linken und im rechten Spektrum », Convergences, vol. 88, éditions Peter Lang, Bern, 2017.
  • Corvez M., « L’Être et l’étant dans la philosophie de Martin Heidegger », in Revue Philosophique de Louvain, n°78, 1965.
  • Haesler A., « Victor Cousin en Allemagne », in Lectures, Les notes critiques, 2011.
  • Jacq-Mioche S., « La virtuosité dans le ballet français romantique : des faits à une morale sociale du corps », in Romantisme, vol. 128, n° 2, 2005.
  • Martinez M-L., Larrue M., « La séquence”donner, recevoir, rendre” et ses ratés dans la transmission intergénérationnelle… », in Biennale internationale de l’éducation, de la formation et des pratiques professionnelles, 2012.
  • Moreau D., « Que signifie la référence à l’humanisme dans la pensée éducative contemporaine ? », in Itinerarios de Filosofia da Educaçâo, 2010.
  • Pulliero M., « La maison d’éditions Diederichs et la revue Die Tat au cœur d’un projet de Lebensreform comme réforme religieuse, culturelle et sociale », in Marc Cluet, Catherine Repussard, Lebensreform. Die soziale Dynamik der politischen Ohnmacht, Francke Verlag, 2013, p. 85-116.
  • Roumanes J.-B., « Le paradigme esthétique », in Horizons philosophiques, 1993.
  • Thèses
    Kirchgraber Foitzik R., Lebensreform und Künstlergruppierungen um 1900, Zürich, 2003.
  • Namèche I., Le savoir-danser d’Isadora Duncan. Origine et transmission d’une oeuvre esthétique, Education. Normandie Université, 2019.
  • Nihoul F.-G., De la Philosophie à la Paideia- Pour une éducation vers l’Excellence, Université Catholique de Louvain, 2016-2017.
  • Streicher C., L’appropriation de l’art grec dans les écrits de J.-J. Winckelmann, Thèse présentée comme exigence partielle au doctorat en histoire de l’art, UQÀM, Université du Québec à Montréal, avril 2010.

ARCHIVES

 

  • Centre de Berlin
    Archive Bundesarchiv Berlin-Lichterfelde R56/V 1174, Notice biographique d’Elizabeth Duncan datée du 31 mars 1937.
  • Centre de Cologne
    Archive du centre de la danse de Cologne, Nr. 69, Livret Verein zur Unterstützung und Erhaltung der Tanzschule von Isadora Duncan E.V.
    Archive du centre de la danse de Cologne Nr. 69 « Programme éducatif de Berlin, 1904 « École à Grunewald ».
    Archive du centre de la danse de Cologne Nr. 69 Document promotionnel – « Elizabeth Duncan-Schule Marienhöhe bei Darmstadt, Institut für körperliche und wissenschaftliche Erziehung, Ausgezeichnet mit dem grossen Preis der internationalen Hygiene-Ausstellung Dresden 1911 », « École d’Elizabeth Duncan Marienhöhe bei Darmstadt, Institut d’éducation corporelle (ou physique) et scientifique, Attribution au Grand Prix de l’exposition internationale de l’Hygiène à Dresde en 1911 ».
    Archive (en langue française) du centre de la danse de Cologne, KOE 13 « Règlement de l’école d’Elizabeth Duncan à Darmstadt ».
  • Ecole d’Elizabeth Duncan
    Archive, 50 Jahre Elizabeth Duncan-Schule 1904-1954. Herausgegeben von der Elizabeth Duncan Gesellschaft E. V. München.
  • Musée de l’Hygiène
    Archive du Musée de l’Hygiène à Dresde.

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